L’ensemble des organisations de psychologues, dont la SFP, a découvert le 7 avril dernier le dépôt par certains parlementaires d’une proposition de loi portant sur la création d’un ordre pour tous les psychologues. Alors que la SFP participe, avec 22 organisations de psychologues, à l’actualisation du code de déontologie de 2012, aucune consultation n’a été engagée par ces parlementaires pour connaître l’avis de la profession.

La solution d’un ordre professionnel peut spontanément apparaître à certains comme une solution séduisante pour la profession des psychologues. L’encadrement des professionnels par un ordre pourrait ainsi laisser croire à une meilleure protection du public et des professionnels en cas de litige, et donner l’impression d’une profession plus forte. En d’autres termes, on pourrait penser que   l’existence d’un ordre serait une solution efficace, voire incontournable, pour la défendre, protéger les usagers et finalement garantir une pratique de la profession, respectueuse des règles de l’art et de la déontologie.

Plusieurs organisations nationales de psychologues et psychologie ont toutefois déjà clairement exposé leurs arguments en la défaveur d’un ordre professionnel des psychologues, dans un article publié en 2016 (« Quelles évolutions pour la déontologie des psychologues en France : propositions du GIRéDéP », Le Journal des psychologues 2016/5 (n° 337), pp. 34-40).

L’établissement d’un ordre professionnel fait apparaître cinq grands sujets de préoccupation.

La profession de psychologue est la seule profession réglementée à être gérée par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. L’établissement d’un ordre attribuerait donc à cette instance, une fonction qui est actuellement assumée par les pouvoirs publics. Autrement dit, l’ordre viendrait alors simplement se substituer à un dispositif déjà existant et opérationnel.

Un ordre nous confronte à la problématique des modalités d’élection de ses dirigeants et de leur composition, qui ne seraient jamais totalement satisfaisantes. Par exemple, il pourrait en résulter une représentation lacunaire de certains champs d’exercice de la psychologie.

 L’ordre a une fonction disciplinaire en sanctionnant les professionnels qui ne respecteraient pas les règles professionnelles qu’il a adoptées. Or, les sanctions existent déjà dans le droit pénal, la fonction publique et dans certaines conventions collectives. A nouveau, l’ordre professionnel viendrait se substituer à des solutions déjà opérantes.

 Un ordre s’accompagne d’une sélection supplémentaire obligatoire pour pouvoir faire usage du titre de psychologue – ce qui pose la question du devenir d’une personne diplômée qui ne réussirait pas cette sélection. Et bien évidemment, l’établissement d’un ordre conditionnera l’autorisation de la pratique de la psychologie au règlement d’une cotisation.

Cette loi intégrera tous les psychologues au code de la santé publique, dans les professions de santé, indépendamment de leurs champs d’exercice et de leurs référentiels professionnels qui seront ainsi bafoués. Réduire les missions et interventions au secteur de la santé, serait négliger toutes les actions conduites par les psychologues, notamment dans les établissements scolaires, les entreprises, les prisons, visant à proposer des démarches adaptées au respect de la dimension psychique de la personne.

La Société Française de Psychologie s’oppose donc à ce projet relatif à la création d’un ordre des psychologues, à la fois sur le fond mais aussi sur la forme. La SFP a toujours considéré les questions d’éthique et de déontologie comme essentielles pour l’exercice de la profession. Elle a d’ailleurs pris l’initiative dès 1961 de proposer le 1er code de déontologie des psychologues. Elle a largement participé à son actualisation périodique, en 1996 et en 2012, afin qu’il reste vivant et utile aux usagers comme aux psychologues. Cette proposition de loi réalisée sans consultation des organisations professionnelles constitue donc un déni de démocratie et traduit un mépris éhonté à l’égard d’une communauté professionnelle et du travail qu’elle mène depuis de nombreuses années. Au sein du Cerédépsy, la SFP travaille à d’autres solutions pour inscrire le code de déontologie dans la réglementation.